Totems

L’œil de la grande prêtresse de pierre veille avec bienveillance sur nous fragiles mortel(le)s, qui nous abreuvons de gloires éphémères et satisfactions instantanées.
Elle est installée, hors du temps, sur son socle immuable, au dessus de tout sentiment factice, avec sa bonté pour seul attirail.
Elle est paix, calme et puissance douce.
Elle nous attire peu à peu vers les profondeurs de l’émergence, quand les épreuves qui s’enchainent nous rapprochent de sa constance par l’étincelle d’une prise de conscience.
Alors, lorsque l’esprit s’éveille pour dépasser les affronts, les fragrances acides de l’appât du gain, elle se retire, disparait pour nous laisser nous épanouir.
Elle laisse place au bouclier qui réside au fond du cœur, métallique et brillant, il porte le courage d’aller tuer par le rire nos pulsions de domination, et de puiser la matière brute de nos élans mutuels, ceux qui nous entrainent à l’entraide, elle qui a toujours bercé nos songes mais qu’on avait oublié dans les illusions et la recherche d’opulence.
Il est justesse, finesse et le piquant de l’humour qui rassemble.
L’animal argenté ne nous servira pas à chevaucher, bouclier au bras, pour aller conquérir et asservir, il marchera à nos côtés, et nous inspirera la quiétude d’une journée de repos, quand le droit à la paresse et les retrouvailles avec des pensées tendres nous donneront des trésors de compréhension envers nous même, nos êtres aimés et nos semblables.
Il est pure douceur, simplicité et fidélité.
Pas de magie ici, juste les symboles d’un accord entre les forces qui nous animent et les intensions qui nous assemblent comme un mur de brique ou une forêt de roseaux incassables, qui courbent mais ne se brisent pas devant la barbarie neutralisée des violences millénaires – Celles qui se ridiculisent par leur petitesse devant la grandeur d’un livre contenant un tout petit bout de savoir –
Quand le monde brule, s’asphyxie, et que les pitres s’agitent dans ce théâtre ridicule, ce morceau de connaissance grandit de manière exponentielle et donne l’alternative d’une temporalité parallèle par l’abstraction et le sommeil paisible, la distance et le calme.
Accessible par une simple déviation sémantique ou une variation de rythme, elle vivra tant que tous les livres n’auront pas brûlé avec le reste. Et comme un livre s’écrit simplement avec de l’encre et du papier, et que plus encore, la tradition orale ne demande qu’un peu de ce savoir et une langue pour l’exprimer, subsistera alors toujours la flamme qui éteint l’incendie.

The eye of the great stone priestess watches over us, fragile mortals, with compassion, as we drink in fleeting glory and instant gratification.
She sits, timeless, on her immovable pedestal, above all false sentiments, with her goodness as only equipment.
She is peace, calm, and soft power.
She gradually draws us toward the depths of emergence, when trials that follow one another bring us closer to her constancy through the spark of awareness.
Then, when mind awakens to overcome affronts and acrid fragrances of profit, she withdraws, disappears to let us bloom.
She gives way to the shield that resides deep within heart, metallic and brilliant, carrying the courage to kill our impulses of domination with laughter, and draw on the raw matter of our mutual impetuses, those that lead us to mutual aid, the one that has always lulled our dreams but that we had forgotten in our illusions and search for opulence.
It is fairness, finesse, and the spice of humor that brings us together.
The silver animal will not be used to ride, shield in hand, to conquer and enslave. It will walk beside us and inspire the tranquility of a restful day, when the right to laziness and the return of tender thoughts will give us treasures of understanding about ourselves, loved ones, and peers.
It is pure sweetness, simplicity and loyalty
No magic here, just symbols of an alliance between the forces that drive us and the intentions that bring us together like a brick wall or a forest of solid reeds, which bend but do not break under the thwarted barbarism of millennial violence, ridiculed in front of the greatness of a book holding a tiny bit of knowledge.
When the world burns, suffocates, and clowns bustle in this ridiculous theater, this piece of wisdom grows exponentially and offers a parallel temporality through abstraction, peaceful sleep, distance and calm.
Accessible through a simple semantic deviation or a rhythmic variation, it will live on until all books have burnt with the rest. And since it is simply written with ink and paper, and more, that oral tradition requires only this piece of knowledge and a tongue to express it, the flame that blows out the fire will always survive.

B.